Autobiographie d'un sextant
Informations générales
Face au cruel manque d'informations quant au sextant de Hoppe, nous avons décidé d'user de la fiction pour présenter les quelques indices que nous avons pu rassembler. Ne serait-ce que concernant la date de création de notre spécimen n°253, nous savons uniquement qu'il a été conçu entre 1805 et 1810 mais, pour le bien de notre narration et aux vues du numéro de série de l'objet, nous avons arbitrairement tranché pour l'année 1810.
Nous disposons de très peu d'informations au sujet de son fabriquant, Ebenezer Hoppe. Nous savons néanmoins qu'il a bel et bien tenté de vendre son modèle de sextant amélioré à la marine américaine. Il rédige ainsi directement une missive à Thomas Jefferson, Président des Etats-Unis d'Amérique, le 18 juillet 1804. Le 25 septembre de la même année, c'est Thomas Truxton qui sollicite l'attention du Président en joignant à son courrier des pamphlets vantant l'ouvrage de Hoppe. Une réponse lui parvient le 4 octobre, selon laquelle le Président n'a pas, à ce moment donné et en dépit de son intérêt pour la question, encore eu le temps de s'y pencher.
Lettre d'Ebenezer Hoppe à Thomas Jefferson. (1804, 18 juillet). https://www.loc.gov/item/mtjbib013645/
Tout porte à croire qu'Ebenezer Hoppe n'a jamais pu exporter ses sextants aux Etats-Unis car il fait bel et bien banqueroute en 1811. Cette frasque est en effet rapporté par The London Gazette.
The London Gazette. (1811), p.1339.
A partir de là, nous perdons la trace du sextant. En se basant sur les expéditions scientifiques maritimes de l'époque, qui requéraient évidemment au moins un sextant à bord, nous avons élaboré un semblant de récit de voyage, volontairement éludé pour ne pas prendre le risque de se perde dans un contexte sociohistorique peu maîtrisé. Néanmoins, elle s'inspire allègrement du véritable périple de l'Uranie entre 1817 et 1820, partie de Toulon en direction de l'Australie puis des îles du Pacifique, notamment dans le but d'en cartographier les côtes.
La façon dont notre sextant s'est retrouvé dans les mains d'August Winnecke alors qu'il cherchait à établir une collection scientifique pour l'Observatoire astronomique de Strasbourg demeure un mystère. Assigner une origine alsacienne à notre naturaliste fictif nous a permis de contourner ce problème mais il est probable que le sextant ait bien plus voyagé avant de rejoindre l'Observatoire strasbourgeois. Sa présence y est effectivement attestée grâce à l'inventaire allemand, débuté en 1886 et poursuivi par les Français après la Seconde Guerre mondiale, à la section "B. Transportable Instrumente".
Inventar der Kaiserlichen Universitäts-Sternwarte Strassburg. (1886), p.18.
L'autobiographie de notre sextant se poursuit ainsi jusqu'à nos jours, avec un ajout de notre groupe de projet au sujet de sa fiche descriptive remplie lors du dernier inventaire des collections universitaires. En effet, il y est écrit que seule la clef (en réalité toute la serrure) manque au sextant, mais ce n'est pas tout. En effet, en le comparant avec un sextant du même modèle appartenant à la collection du Museums Victoria, à Melbourne, nous nous sommes rendus compte que l'étrange pic présent sur le bras de notre sextant servait en effet de support à une loupe, permettant une meilleure lecture de la mesure effectuée.
Sextant de Hoppe, Londres. (vers 1810) Nick Crotty © Museums Victoria
Bibliographie :
- E. Hoppe to Thomas Jefferson, July 18, 1804. (s. d.). The Library of Congress. https://www.loc.gov/item/mtjbib013645/
- Heck, A. (2004). L’Observatoire Astronomique de Strasbourg et son histoire multinationale. Orion, 61/6-62/3. http://www.aheck.org/or_sxb_fasc.pdf
- Instrument de mesure des angles (sextant de Hoppe N° 253). (2004). POP - La Plateforme Ouverte du Patrimoine. https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM67015736
- L’observatoire astronomique de Strasbourg. (2008). SF2A 2012, 743‑753. https://www.researchgate.net/publication/258735093_L'Observatoire_astronomique_de_Strasbourg
- L’observatoire astronomique de Strasbourg. (2009). Lieux Dits.
- Morrison-Low, A. L. (1999). The Scientific Instrument Trade in Provincial England during the Industrial Revolution 1750-1851. University of York.
- Observatoire astronomique de Strasbourg. (2021, 8 juin). La collection d’astronomie. https://astro.unistra.fr/fr/tout-public/patrimoine-historique/collection-astronomie/
- The Uranie Voyage. (s. d.). Western Australian Museum. https://museum.wa.gov.au/research/research-areas/maritime-archaeology/treasures-from-the-deep/uranie-voyage
Sources audio :
- https://www.youtube.com/watch?v=MJeNG1R7FzM&ab_channel=AmbienceofYesteryear
- https://www.youtube.com/watch?v=beOw8MEojQ4&ab_channel=MichaelGhelfiStudios
- https://www.youtube.com/watch?v=HwXTEvTlA8Q&ab_channel=ASMRWeekly
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