Billet

12/12/15 - Premiers pas en Antarctique

Publié le
26 juillet 2017
par Baptiste Gombert
Mis à jour le
15 février 2018
Sismologie
A l'écoute du sol

Cette fois ça y est, c’est le grand départ. Il est 9h en ce vendredi matin et nous sommes tous réunis à l’aéroport d’Hobart. Outre le groupe de 12 français que nous formons depuis Paris, 2 italiens et 2 australiens seront du voyage jusqu’à Casey. Une gigantesque pile de sacs s’amasse petit à petit dans le hall d’enregistrement de ce petit aéroport. Puis vient l’enregistrement pour ce vol un peu particulier. On pèse nos sacs, puis nos bagages à main, puis enfin nous-même, sous l’œil médusé des autres voyageurs. Cette pesée doit être communiquée au pilote du 2ème avion qui nous attends à Casey pour nous conduire à Concordia. Après un passage par la douane, nous embarquons dans un Airbus 319 spécialement aménagé à cet effet.

Pas la même ambiance que sur un vol Easyjet

Intérieur de l’Airbus 319 spécialement aménagé pour les vols vers l’Antarctique.

Et c’est le décollage…

A bord l’ambiance est très détendue : discussion avec les pilotes dans la cabine de pilotage, sieste sur le plancher, etc. Après 3h de vol, les premiers icebergs font leur apparition.

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A l’approche du continent, le pack dérivant fait son apparition

D’abord un, puis deux, puis c’est le pack glaciaire et enfin la banquise qui se dévoilent. Aucun doute possible, on approche !

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Un écran de vol bien inhabituel !

4h après le décollage d’Hobart et son ambiance estivale, le train d’atterrissage touche la piste de glace. Nous sommes en réalité à 80km de Casey, plus à l’intérieur du continent. Nous sommes encore proche de la côte et ici la glace bleue est apparente (alors qu’elle se trouve sous 130m de neige à Concordia).

 

Nous descendons de l’avion, et je fais enfin mes premiers pas en Antarctique.  La température est relativement clémente, il fait -6°C. Mais malgré le soleil, le vent souffle fort et le froid se fait vite ressentir. En traversant la piste jusqu’au baraquements qui font office de poste de contrôle, j’aperçois notre deuxième avion qui doit nous conduire jusqu’à Concordia, un magnifique Basler BT-67.

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Mes premiers pas en Antarctique ! Georges, le futur hivernant électricien à Concordia, devant l’Airbus qui vient de se poser sur la piste de glace.

Mais une fois tous regroupés, une nouvelle nous attends : seulement la moitié d’entre nous, soit 7 personnes, iront aujourd’hui jusqu’à Concordia. Dans la plus pure tradition Antarctique, c’est complétement imprévu, soudain, et le motif est assez obscur. Nous attendons tous nerveusement la liste de ceux qui continuent leur route. Pour certains scientifiques, la quantité de travail est telle qu’il n’y a pas une journée à perdre. Finalement, le verdict tombe : je pars dans immédiatement à Concordia, avec 6 autres scientifiques. Pour les autres, y compris 3 hivernants, c’est direction la base de Casey dans un drôle de bus à chenille. Leur vol est prévu le lendemain, si le temps le permet. (Ajout du 18 novembre : après une semaine coincés à Casey, les voilà enfin arrivés !).  Le temps de dire au revoir à nos compagnons de voyage et nous embarquons dans le Basler.

 

Le vol s’annonce assez éprouvant. La cabine n’est ni chauffée, ni pressurisée, le bruit des moteurs est assourdissant et une odeur de kérosène envahie l’espace.

Rapidement, le froid et l’altitude viennent à bout de l’excitation du départ. Le paysage est d’une extraordinaire monotonie, où seuls quelques nuages viennent projeter leur ombre sur cette ahurissante étendue de glace dont l’œil ne peut percevoir la fin.

Après 3h de vol un peu dans les vapes à cause du froid et du manque d’oxygène, on tapote sur mon épaule. « Landing in 10minutes » me hurle le copilote Canadien pour couvrir le bruit des moteurs. La montée d’adrénaline me donne un coup de fouet et je guette à la fenêtre.

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Le Basler-BT67 est là et nous attends pour nous emmener à Concordia, la dernière étape de notre voyage.

Soudain, j’aperçois une trace rectiligne dans la neige qui semble continuer tout droit sur des centaines de kilomètres : c’est la piste du Raid, qui relie Dumont d’Urville à Concordia. Et à son extrémité se dévoile enfin la base de Concordia, improbable et inespérée au milieu de ce désert glacé. Il est 19h, le soleil brille et il fait -35°C. Les 65 personnes alors présentes à la base sont dehors pour nous accueillir, et nous conduisent joyeusement au chaud pour le diner. Nous sommes enfin arrivés au bout du chemin, mais surtout au bout de nulle part.

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L’atterrissage du Basler à Concordia

(CC) BY-NC-SA

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