Billet

Vicenzo Coronelli et les globes de Marly

Publié le
06 mai 2020
par Delphine Issenmann
Mis à jour le
19 mai 2020
Astronomie & Astrophysique
Objets de sciences

Moine d’origine vénitienne, Vicenzo Coronelli (1650-1718), est un cartographe, cosmographe et géographe rendu célèbre par la conception des globes dits de Marly.

Vincenzo Coronelli

       Vincenzo Coronelli

Louis XIV, le Roi-Soleil, symbolise à la fin du 17e siècle la monarchie absolue et attire autour de lui une cour dont l’ambition personnelle se confond souvent avec le service du souverain. Ainsi, l’ambassadeur du roi à Venise, le cardinal d’Estrées, veut faire au monarque le plus beau des cadeaux : une paire de globes. Le globe terrestre doit représenter l’état du monde connu alors, illustrant notamment les conquêtes royales et l’expansion coloniale, tandis que le globe céleste figurera l’univers où la figure royale est là aussi omniprésente - le ciel y est fixé comme il l’était au moment de la naissance du roi, le 5 septembre 1638 : « les planètes sont placées au lieu même où elles étaient à la naissance du glorieux monarque afin de conserver à l’éternité l’image fixe de cette heureuse disposition sous laquelle la France a reçu le plus beau présent que le ciel ait jamais fait à la Terre ». 

C’est à Vincenzo Coronelli, qui a acquis une solide réputation dans la conception de globes, que l’ambassadeur passe commande d’une paire de globes monumentaux

Des objets d’une telle taille étant intransportables depuis l’Italie, le moine s’installe à Paris et, entre 1680 et 1683, œuvre avec ses collaborateurs à la conception des sphères, dont le diamètre attend près de 4 mètres : une véritable prouesse technique dont Coronelli est très fier ! Destinés à Versailles, les globes sont finalement installés en 1703 dans la résidence personnelle du roi : le château de Marly, qui leur donnera leur nom. C’est là que Louis XIV, près de vingt ans après leur achèvement, peut enfin les découvrir. Exposés dans deux des pavillons du château, ils bénéficient d’un aménagement spécial conçu par Jules Hardouin-Mansart, surintendant des bâtiment du Roi : une galerie installée à mi-hauteur permet aux illustres visiteurs de l’époque, comme la reine Anne d’Angleterre, d’en admirer les détails.

Coupe d'un des pavillons des Globes à Marly Topographie de la France. Département des Yvelines 1679. BnF, Département des Estampes et photographie, VA-78A (2)-FOL © Bibliothèque nationale de France

Coupe d'un des pavillons des Globes à Marly. Topographie de la France. Département des Yvelines /1679.

BnF, Département des Estampes et photographie, VA-78A (2)-FOL

© Bibliothèque nationale de France

Comme les monarques, les riches particuliers et certaines institutions florissantes de l’époque se font fort de posséder eux aussi de tels symboles de puissance et de connaissance. Coronelli se lance à la suite de ce succès dans l’édition de globes gravés, préférant se réserver l’exploitation du matériel considérable qu’il avait accumulé pour la commande du cardinal d’Estrées, plutôt que de répondre aux sollicitations d’un éditeur hollandais. En 1697, il publie un ouvrage dédié aux globes : Libro dei globi,  avec les fuseaux de tous les globes imprimés.

Il poursuit par ailleurs son activité de cartographe en fondant en 1684  à Venise l’une des premières sociétés géographiques : l’Accademia Cosmographica degli Argonauti.

Coronelli est semble-t-il par la suite victime de la démesure des ses projets et dépenses. Soupçonné de mauvaises tractations, il est déchu par le Pape de son grade, le plus élevé de son ordre monastique, de chevalier des Frères mineurs,  et est rappelé à Venise, où il finit sa vie en exerçant en tant qu’ingénieur hydraulique tout en poursuivant la diffusion de ses globes.

Quant aux globes de Marly, ils ont rejoint en 1715 les locaux de la Bibliothèque Royale au Louvre. Ils sont à partir de 1915 remisés à Versailles où l’échec des projets successifs de valorisation les font peu à peu tomber dans l’oubli. Redécouverts par le grand public lors d’une exposition sur les cartes au Centre Pompidou dans les années 1980, ils sont à nouveau l’objet de toutes les attentions : c’est finalement la Bibliothèque Nationale de France qui mène à bien leur restauration en 2005. Après avoir été présentés au grand public sous la verrière rénovée du Grand Palais, les deux globes sont depuis 2006 exposés à la Bibliothèque Nationale de France, site François Mitterrand.

Globe terrestre de Coronelli, exposé à la BNF/Site François Mitterrand.

Globe terrestre de Coronelli, exposé à la BNF/Site François Mitterrand.

=>Pour en savoir plus sur les globes de Marly : http://expositions.bnf.fr/globes/index.htm

Ce billet fait partie du parcours temporel Le globe céleste de Coronelli, histoire d’une renaissance

CC-BY-SA-ND-NC

 

Informations générales