Dernière rencontre du groupe Youth for Climate avec le Jardin des sciences
Le lundi 20 septembre, les membres du groupe Youth for Climate ont rencontré pour la dernière fois Jean-Baptiste Ortlieb, en présentiel à Colmar, et Marianne Buffard du Jardin des sciences par téléphone, afin de faire le bilan du parcours de réflexion collective qu'ils ont mené ensemble sur l'année 2020-2021.
L'objectif de cette discussion spontanée et informelle était de faire discuter de leurs retours sur cette expérience menée à nos côtés : ce qu’ils ont retenu, ce qu’on a pu faire malgré tous les freins qu’on a connu avec le covid et autre – ce que cela a impliqué pour eux tant d’un point de vue de l’investissement, du point de vue horaires – comment ils ont pu s’organiser avec ça mais aussi ce que cela leur a apporté. Ce qu’ils en retiennent aussi du point de vue de l’intérêt général : est-ce qu’ils pensent que cela a eu un gros impact ? un impact tel qu’ils l’attendaient ou est-ce mieux ? moins bien ?
Voici quelques extraits de leur réflexion et des échanges que nous avons eu.
Réflexion sur ce qu'ils en retirent, et leur positionnement sur les modes d’actions traditionnels proposés aux jeunes (notamment les marches pour le Climat)
Lucie : « La violence décrédibilise la cause. Et ça perd tout son sens parce que les gens qui ne sont pas sensible à cette cause vont se moquer et encore plus renforcer leur point de vue. Ça n’a aucun intérêt et c’est dommage. […] C’est toujours bien de voir deux approches : un projet plus technique et une approche comme on fait nous, parler, sensibiliser. […] Moi, je trouve que le fait que vous nous ayez pris avec vous dans votre projet, aidé, accompagné, c’est vraiment super. Surtout que vous ne nous connaissiez pas beaucoup et qu’on avançait un peu à l’aveugle. C’est super que vous ayez eu confiance comme ça en nous. Au début, on ne comprenait pas trop pourquoi on était là, qu’est-ce qu’on allait faire et après par la suite, on a compris que ça allait être super ! […] Après nos actions, notamment la fresque du Climat, j’en ai beaucoup parlé avec mes parents, avec conviction : on a fait ça, ça, ça et mes parents étaient impressionnés qu’on ait fait et vu autant de choses. […] C’était vraiment des opportunités pour nous et des occasions pour découvrir ou redécouvrir des choses qu’on aurait pas vu à l’école, au lycée ou à la télé. C’est vraiment quelque chose d’exceptionnel ! On est vraiment très satisfait de tous les projets. […] Ca nous aide à concrétiser. Le problème, c’est toujours le même : [au stand de sensibilisation] on n’était pas nombreux et ça a bien marché, mais si on veut faire quelque chose – le 24 septembre c’est mondial - au niveau de Colmar, il faut quand même être un certain nombre, et je pense que c’est ça qui nous freine. Le fait qu’il n’y a pas beaucoup de monde qui aille jusqu’au bout. C’est aussi des freins, l’organisation, le temps... le fait de ne pas connaître les autres personnes… le thème de la confiance. […] Avec les marches, je veux pas dire que c’est vu et revu – il faut continuer à manifester – mais on le vois bien, ça n’a pas vraiment d’impact alors que les stands de sensibilisation qu’on a fait, ou la fresque du climat, ça apprend plus personnellement. Ça fait interagir la sensibilité de chacun. »
Jeanne : « Au moment où on a commencé à travailler ensemble, il y avait un vide d’un point de vue associatif « Youth for climate Colmar ». Il n’y a pas de choix d’une voix ou l’autre mais on s’était une continuité. Le projet s’est présenté avant que le groupe que soit dissout…Le projet est arrivé en fin d’année scolaire et avec les vacances et la nouvelle année qui arrivait, les personnes les plus âgés du groupe et qui tenaient le truc ensemble sont partis faire des études supérieures.. il y a eu cette continuité qui venait du groupe Youth for Climate et qui après est partis vers ce projet. Et c’est sûr que, pour moi, ça a confirmé le fait que je préfère agir dans de la sensibilisation plutôt que dans d’autres voies d’actions comme les manifestations un peu « violentes » entre guillemets – ils avaient parlé une fois de verser un peu du faux-sang devant un supermarché… C’est des choses qui pour moi ne me paraissent pas utiles, me paraissent décrédibiliser la cause écologique. […] Les personnes qui organisent les manifestations et connaissent le but précis et les causes d’actes un peu violents – je prends justement cet exemple de se mettre du faux sang dessus, ça peut être compris, il peut y avoir derrière des raisons qui peuvent être compréhensibles et qui peuvent être prises en compte mais quand tu sais pas, ça va juste créer un fossé encore plus important avec ceux qui savent pas pourquoi ils font ça… […] Personnellement, ça me donne plus envie de faire de vrais projets. Avant, j’étais consciente de ce qui se passait et j’avais envie d’agir. Mais par exemple, lorsqu’on est allé avec Marianne au lycée, qu’on est allé voir mes profs – enfin des profs du lycée Bartholdi – et qu’on a commencé à expliquer des choses à des personnes qui n’étaient pas forcément conscientes de ça, c’est aussi assez intéressant de pouvoir voir comment des personnes adultes ont pu réagir à ce qu’on a dit, de voir qu’on peut apporter des choses à tout le monde parce que ce n’est pas une vérité qui est connue de tous réellement. Surtout des points techniques comme on a vu par rapport à la fresque du climat. Et quand on a fait la matinée de sensibilisation, c’est sympa aussi. Après quand tu rentres chez toi, tu as l’impression d’avoir enfin fait vraiment quelque chose – un truc enfin concret ! […] Cela m’a donné envie de récréer des projets au sein de Youth for Climate Colmar, du coup j’essaye de réfléchir en même temps des cours… surtout qu’il y a bientôt de nouveau une journée mondiale le 24. Et j’ai essayé de chercher des choses à faire qui ne soient pas une marche – parce quand on a organisé des marches, ça fonctionnait pas – et qui ne soient pas une « walk » où on nettoie. […] [En parlant des marches pour le climat] Mais à la fin de la journée, je trouve que tu n’as pas plus appris. Tu loupes plus en n’allant pas en cours qu’en allant à la marche… La Fresque, c’est une base où on nous a donné pleins d’éléments assez poussé, descriptif en profondeur qui nous permettent à nous d’en parler avec plus d’assurance et cela a peut-être un plus grand impact que lorsqu’on essaye d’organiser une marche et qu’au final on est 10 personnes, déjà concernées en plus puisqu’elles sont là. »
Alexis : « Y’en a qui manifeste sans prendre en compte tous les détails. Ils manifestent pour manifester et ils ont pas les mêmes compétences que nous. Par ce que nous, on a vu des choses qu’ils n’ont pas vu. Ils sont juste dans la manifestation pour défendre ça mais sans les notions… […] On a pu approfondir nos connaissances, qu’on a pu approfondir sur le terrain, ça nous a apporté un peu plus que ce qu’on pensait avant, notamment quand on est allé pour l’animation sur Fessenheim. On espère continuer du coup sur cette lancée-là ! [...] Donc, on peut retransmettre plus facile. Ca a aussi un impact. [...] La fresque du Climat fait une base, des fondations, qui permettent d'aller plus loin. »
Est-ce que en citoyens, vous avez eu l’impression, d’avoir pu peser d’une certaine manière en tant que citoyens dans l’avenir de votre territoire ? du point de vue local et du territoire de Fessenheim ? Est-ce que cela leur permet aussi de mieux rebondir autour du projet de territoire de Fessenheim ? Est-ce qu’il y a des choses qu’ils aimeraient encore plus creuser, travailler etc ?
Lucie : « Etre sur place, ça nous a déjà beaucoup aidé. Le fait de voir, de comprendre, d’essayer de comprendre l’avenir de la centrale, si on l’étudie pas le secteur, sur un format papier, vidéo, c’est différent qu’être sur place – d’y être aller c’est un atout. Et cela rend sensible aux habitations autour et à tout ce qu’on nous expliqué aussi sur la forêt. On se rend compte qu’on ne fait pas assez de sortie en forêt, dans la nature, avec le lycée, de sensibilisation qui ont un sens, ni des projets qu’on a fait avec vous. Alors que pour moi c’est un complément essentiel du lycée : il faudrait instaurer des cours, des sorties au sein de la nature et nous expliquer aussi par rapport à Fessenheim…. [Sur la question des déchets nucléaires] Eux même ne savent pas, c’est quand même un dilemme, une question à laquelle on ne sait pas répondre. Du coup, à comprendre pourquoi cela fait autant de bruit –pourquoi personne ne sait répondre à ces questions et pourquoi une grande majorité est pour les centrales : ils regardent plus le bénéfice que le risque. Après faire une sensibilisation sur ça, et au niveau politique, ça serait bien, mais bon c’est hors de nos capacités ! Il faudrait rassembler tous les documents nécessaires, prouver tous les risques possibles, et qu’il ne faut pas privilégier l’économie à la santé quoi. Si ça explose, ils savent très bien…. J’ai l’impression qu’ils n’ont pas eu de leçons, tirer de moral de Fukushima, des accidents qui se sont passés… à Tchernobyl. Ils ont beau faire des séries, ils ont beau faire des articles, ils n’ont toujours pas assimilé qu’il faut privilégier la santé à l’économie. Si il y a des accidents, cela va aussi toucher l’économie indirectement donc…».
Jeanne : « Le but c’est quand même la transition autour de Fessenheim et le fait d’arrêter le nucléaire aussi. Et c’est difficile parce que en classe, le débat s’arrête à « on a du nucléaire, c’est mauvais parce qu’une fois qu’on a des déchets radioactifs, on ne sait pas quoi en faire ». Mais à la place on ne sait pas vraiment quoi faire, quoi mettre, parce qu’il y a pleins d’autres choses qui pollue aussi. Et là, le fait d’y aller… je me rappelle d’une info sur les personnes qui vivent autour et qui doivent prendre un cachet s’il y a un problème. Rien que de se rendre que les gens vivent avec ce danger tous les jours, ça nous fait nous nous rendre compte du danger. Même nous, on est pas assez loin pour qu’il n’y ait pas de risque. […] « Est-ce que d’après nous, on a l’impression d’avoir pris par de près ou de loin à ces enjeux de transformation du territoire sur les questions d’énergies ? L’intérêt qui est certain, c’est que cela permet de mieux comprendre. La dernière fois, j’ai écouté le débat pour le premier tour des élections – la primaire – pour savoir qui se présentaient chez les écolos.. et il y a une dame [Sandrine Rousseau] – qui disait que les déchets radioactifs, elle n’était pas du tout pour qu’on les enterre mais qu’elle n’était pas pour qu’on les laisse à la surface non plus. Et c’était un peu difficile à comprendre en soi – pourquoi pas les enterrer, pourquoi pas les laisser en surface, qu’est-ce qu’on en fait enfaite ? Je pense que cela m’a permis de mieux comprendre pourquoi c’est dur de les enterrer ou de les laisser en surface : le projet m’a aidé à comprendre le questionnement. […] Dans notre système, à la base c’est nous qui élisons les politiques donc le fait de nous, nous sensibiliser c’est quand même utile, car nous nous pouvons élire des personnes qui sont sensibles à cette cause. Et du coup, les personnes qui le sont moins, essayer de les évincer pour que cela avance dans le sens qu’on aimerait que ça avance ».
Alexis: « On a pas de connaissances sur la gestion des déchets, donc personne ne peut vraiment intervenir car personne ne sait le faire. […] Cela serait bien d’avoir plus de témoignages des personnes aux alentours. […] Des témoignages poussés, de leur vécu, de voir s’ils ont vu tels reportages ou séries type Tchernobyl…et voir leurs craintes. C’est quand même important d’écouter leurs craintes et les transmettre aux pouvoirs politiques. Ça, après c’est encore une autre difficulté ».
Ils s’interrogent sur ce que ressentent et vivent les habitants du territoire. Lucie regrette de n’avoir pas eu l’opportunité de pouvoir aller au cœur du point de vue des habitants, pour voir s’ils ont des craintes, se posent des questions, connaitre leurs ressentis. Alexis, lui regrette que certains projets que nous avions envisagés ensemble sur le recyclage des déchets, et des déchets électroniques, notamment n’ait pu aboutir.
Et après ?
Alexis : «Je suis devenu bénévole depuis quelques mois dans un Fablab [laboratoire de fabrication] à Ribeauvillé (RIBOLAB, on a lancé un projet et on a avancé très vite […] En janvier 2022, j’aimerais lancé un pôle développement durable où je serais responsable de projets. On voudrait créer des projets dans la gestion des déchets pour la revalorisation, faire de la récupération de matières premières, on aimerait aussi des idées pour améliorer les futurs projets. […] L’avantage, c’est que tout soit fabriqué localement et sans importation de pays étrangers. Favoriser ce type de lieu pourrait réduire l’empreinte carbone. Je compte débuter ce nouveau projet pour devenir toujours plus responsable. Beaucoup de concertations, mais un projet ambitieux pourrait être réalisé. »
Retrouvez la présentation du Pôle Développement durable de Ribolab ici
Jeanne : « Le seul socle que je me vois utiliser pour l’instant, c’est YFC Colmar, parce que ça existe, parce que c’est là. Je me voyais re-proposer quelque chose : un projet concret auquel on déjà réfléchit avant, pour savoir quoi proposer, dans quelle mesure on veut l’organiser et tout ça. Parce qu’au final, on les plus âgés du groupe maintenant. Donc c’est à nous de l’encadrer ».
Lucie : « L’année prochaine, je ne sais pas où je serais : à Strasbourg, à Lyon, à Colmar, j’en ai aucune idée. Et je ne sais pas, moi-même si je pourrais continuer à être avec YfC Colmar. Ce qui m’aurait plu, c’est de continuer avec vous mais le projet était provisoire et peut pas continuer dans le temps. Le problème aussi, c’est l’âge [et le temps qui passe et les emplois du temps et par conséquent, les possibilités d’engagement qui varient !]. »
Encore un grand merci à vous trois pour votre engagement au sein du projet.
Ce contenu fait parti des parcours suivants :
Carnet de bord du projet "Transition énergétique : défis citoyens"
Le projet "Transition énergétique : défis citoyens" sur le terrain
TE : DC x Youth for Climate Colmar
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